L’euphémisme comme mécanisme discursif de la «novlangue» dénoncée par Nicole Malinconi dans le "Petit abécédaire de mots détournés"

En 2006 Nicole Malinconi publie un livret difficile à classer, par rapport auquel les réserves n’ont pas manqué : le Petit abécédaire de mots détournés, initiative jugée empreinte de nostalgie pour un état antérieur de la langue non précisé, qui ne revendique pas d’ailleurs un statut de travail de linguiste ou de lexicographe. Il s’agit plutôt d’une réaction en tant qu’humaniste vis-à-vis d’une malversation de la langue opérée conjointement dans les discours politique et bureaucratique et généralisée à travers les médias. L’objectif du Petit abécédaire de mots détournés est de dénoncer les perversions du langage public, qui, par son obscurité et son abstraction délibérées, contribue au malaise grandissant de l’individu dans la société actuelle, où une espèce de «novlangue» orwellienne exerce une emprise subtile, mais inexorable, sur les esprits, réduisant les humains à un rôle contraint et passif. Notre analyse se penche en particulier sur l’usage des euphémismes à l’intérieur de cet inventaire.