Voies de liberté : humanisme et transcendence

Que veut dire «liberté»? Nous entendons habituellement la liberté comme l’absence d’obstacles qui nous empêcheraient de rejoindre l’objet désiré parmi des alternatives données. Nous croyons savoir par expérience immédiate ce qu’est la liberté et pensons que la difficulté consiste seulement dans sa réalisation. L’alliance entre la science et la technique qui domine le modèle de la civilisation occidentale semble avoir pour fin précisément la capacité de pouvoir donner pleine satisfaction au désir; et l’on pense que c’est là une conquête de la liberté: la liberté de connaître, de prendre ou de faire n’importe quoi. Horkheimer et Adorno ont vu profondément les caractéristiques, la grandeur et les limites de la civilisation bourgeoise des Lumières articulée sur le binôme «savoir – pouvoir». Ils ont dénoncé le danger qui s’y cache: le sens de l’histoire ne se résout pas dans le fait d’acquérir un plus grand pouvoir de satisfaction des besoins naturels ou des désirs suscités par les arts du marché. Nous attendons tous, bien plutôt, une transformation de l’homme. En évaluant le rapport entre raison et liberté, dans le cadre des discussions éthiques de la tradition, on a cru que l’homme pouvait voir le bien avec sa raison et se conduire toutefois librement d’une manière inadéquate au bien reconnu. Aujourd’hui le rapport entre raison et liberté nous apparaît de manière nouvelle: la liberté ne regarde pas seulement la volonté, mais aussi la pensée. Nous ne pourrions renvoyer au bien qui dépasse notre nature si la liberté n'était intimement unie à la raison. Seule la liberté, en effet, permet un rapport pur à la vérité, au-delà des idoles du pouvoir qui nous assaillent et nous suggestionnent. Être libres pour la vérité: voilà la victoire sur les idoles.