Dans cet article, l'auteur se propose de lire l’article CARTESIANISME de l’Encyclopédie et les articles que les divers dictionnaires de l’époque consacrent à Descartes comme pouvait les lire à l’époque des Lumières un lecteur intéressé aux principes et aux théories de son philosophe, passionné de philosophie et attentif à son histoire non moins qu’à son actualité, vigilant sur les usages de la langue non moins que sur la consistance de ses connaissances. Dans cette péripétie idéale dans la bibliothèque des dictionnaires « du siècle des dictionnaires », tout d’abord il aurait cherché le Dictionnaire universel de Furetière, impressionné par le caractère universel de l’ouvrage. Mais, préoccupé d’acquérir aussi quelques éléments de spécialisme philosophique, s’il connaissait le latin il aurait aussi jeté un œil sur le Lexicon philosophicum de Chauvin, et il aurait feuilleté le Dictionnaire historique de Moréri pour joindre l’histoire à la philosophie. S’il connaissait l’anglais, il aurait consulté aussi la Cyclopædia de Chambers, et il aurait enfin ouvert le Dictionnaire universel de Trévoux dans lequel il aurait pu aussi contrôler les positions de l’orthodoxie religieuse à l’égard de son sujet. Et, à la fin de cet itinéraire lexical, sémantique, historique, philosophique et théologique, il serait tombé sur les pages de l’article CARTESIANISME du volume II de l’Encyclopédie, heureux d’en pouvoir encore disposer, avant le scandale du 1752. Ce lecteur aurait alors remarqué dans un cas particulier mais particulièrement sensible la distance qui sépare les dictionnaires de cette époque de l’Encyclopédie : les discontinuités entre l’érudition et la philosophie que d’Alembert sanctionne dès le Discours Préliminaire ; le rôle fondamental que joue selon Diderot la théorie de la définition pour caractériser une encyclopédie par rapport aux dictionnaires ; la pluralisation des points de vue qu’un ouvrage rédigé par un auteur pluriel - "une Société de Gens de Lettres et d’Artistes" - opère sur le même sujet à son tour pluriel et multiple comme la figure et la philosophie de Descartes ; il aurait compris la valeur philosophique de la question de l’héritage de ses doctrines et apprécié le sens théorique de la discussion autour de ses résultats scientifiques sans les divers champs du savoir ; enfin, il aurait perçu la vitalité et l’actualité dont les Philosophes investissent sa figure alors qu’ils oublient ou rejettent la plupart de ses doctrines.

Spallanzani M. (2011). Les dictionnaires du XVIIIe siècle et l'Encyclopédie. Le cas de Descartes. PARIS : L'Harmattan.

Les dictionnaires du XVIIIe siècle et l'Encyclopédie. Le cas de Descartes

SPALLANZANI, MARIAFRANCA
2011

Abstract

Dans cet article, l'auteur se propose de lire l’article CARTESIANISME de l’Encyclopédie et les articles que les divers dictionnaires de l’époque consacrent à Descartes comme pouvait les lire à l’époque des Lumières un lecteur intéressé aux principes et aux théories de son philosophe, passionné de philosophie et attentif à son histoire non moins qu’à son actualité, vigilant sur les usages de la langue non moins que sur la consistance de ses connaissances. Dans cette péripétie idéale dans la bibliothèque des dictionnaires « du siècle des dictionnaires », tout d’abord il aurait cherché le Dictionnaire universel de Furetière, impressionné par le caractère universel de l’ouvrage. Mais, préoccupé d’acquérir aussi quelques éléments de spécialisme philosophique, s’il connaissait le latin il aurait aussi jeté un œil sur le Lexicon philosophicum de Chauvin, et il aurait feuilleté le Dictionnaire historique de Moréri pour joindre l’histoire à la philosophie. S’il connaissait l’anglais, il aurait consulté aussi la Cyclopædia de Chambers, et il aurait enfin ouvert le Dictionnaire universel de Trévoux dans lequel il aurait pu aussi contrôler les positions de l’orthodoxie religieuse à l’égard de son sujet. Et, à la fin de cet itinéraire lexical, sémantique, historique, philosophique et théologique, il serait tombé sur les pages de l’article CARTESIANISME du volume II de l’Encyclopédie, heureux d’en pouvoir encore disposer, avant le scandale du 1752. Ce lecteur aurait alors remarqué dans un cas particulier mais particulièrement sensible la distance qui sépare les dictionnaires de cette époque de l’Encyclopédie : les discontinuités entre l’érudition et la philosophie que d’Alembert sanctionne dès le Discours Préliminaire ; le rôle fondamental que joue selon Diderot la théorie de la définition pour caractériser une encyclopédie par rapport aux dictionnaires ; la pluralisation des points de vue qu’un ouvrage rédigé par un auteur pluriel - "une Société de Gens de Lettres et d’Artistes" - opère sur le même sujet à son tour pluriel et multiple comme la figure et la philosophie de Descartes ; il aurait compris la valeur philosophique de la question de l’héritage de ses doctrines et apprécié le sens théorique de la discussion autour de ses résultats scientifiques sans les divers champs du savoir ; enfin, il aurait perçu la vitalité et l’actualité dont les Philosophes investissent sa figure alors qu’ils oublient ou rejettent la plupart de ses doctrines.
2011
Les Encyclopédies. Construction et circultation du savoir de l'Antiquité à Wikipédia
344
364
Spallanzani M. (2011). Les dictionnaires du XVIIIe siècle et l'Encyclopédie. Le cas de Descartes. PARIS : L'Harmattan.
Spallanzani M.
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